jeudi 16 août 2012

Lexique des objets kanak que l'on trouve dans les musées

Afin de pouvoir plus simplement s'y retrouver parmi les termes qui seront utilisés sur ce blog, voici quelques explications (cliquer sur les termes en couleur pour voir des images des objets en question).


De toutes les sculptures de la grande case kanak, la flèche faîtière est à la fois la plus importante et la plus fonctionnelle. Dans la construction des cases rondes, le travail de finition de la couverture au niveau du faîtage est une opération délicate car de la position de ce dernier dépend son étanchéité. Il s'agit de resserrer la dernière rangée de paille autour d'un axe sommital, donc soit directement autour de l'extrémité du poteau central, soit contre le pied d'une sculpture faîtière qui vient s'insérer dans la corbeille, à l'alignement du poteau central.
La flèche faîtière mesure en moyenne 2,50m. Elle est constituée d'une pièce de bois allongée, monoxyle sur laquelle on peut distinguer trois parties : en bas, le pied, au milieu, le motif et en haut l'aiguille, sur laquelle des coquillages sont enfilés. Le pied d'une longueur d'au moins 1m est épointé à son extrémité afin de permettre son implantation. Une fois le pied installé dans le dispositif faîtier et recouvert par la paille, seules les deux autres parties émergent du sommet de la case.


Placées de part et d'autre de la porte de la grande case kanak, ces deux pièces sculptées ne sont pas vraiment des chambranles mais plutôt des appliques. Elles ont pour utilité de plaquer contre les parois l'extrémité des lattes et gaulettes qui soutiennent le chaume ou les peaux de niaouli autour des murs de la case.
Leur largeur diffère selon la région (étroits dans l'aire Paicî, plus larges au Nord et sur la côte Est). Le dos des chambranles est légèrement incurvé afin de faciliter leur application contre la paroi. Ces pièces portent parfois, comme les flèches faîtières, des traces de dégradations rituelles (nez cassés, entailles, trous).
 
La "monnaie" kanak, loin d'être un simple moyen de paiement, est toute entière une image des ancêtres. Elle a une "tête" qui peut être sculptée ou tressée, et un "pied" constitué d'une touffe de poils de roussette. Le chapelet de perles est sa "colonne vertébrale" ou "corps". La monnaie est généralement enveloppée d’un étui traditionnellement fait de tapa (liber d'écorce battu) et de poils de roussette tressés. Certaines monnaies sont également protégées dans des étuis rigides en bois sculpté.
Ni équivalent universel, ni moyen de circulation, ni même unité de compte, la monnaie de perles kanak est, selon l'heureuse expression de Maurice Leenhardt, un "sceau". Sa valeur se manifeste dans la marque éminente qu'elle imprime aux échanges cérémoniels et aux diverses relations sociales que ces derniers sanctionnent : non seulement naissance, rites de l'enfance et de la puberté, mariage, funérailles mais aussi jadis alliances guerrières, prix du sang versé, compensations réparatoires pour les fautes commises, etc. La monnaie est à la fois l'incarnation et la mesure de la loi qui régit les rapports entre les hommes, et entre ceux-ci et le cosmos.

La hache bwa vaïk (en langue Nemi, littéralement : "casse-tête de pierre") était un objet de richesse lié aux échanges entre chefferies. Symbole de la puissance, cet objet n'avait d'autre fonction que d'exalter la puissance du clan, d'élever le prestige de l'orateur qui la brandissait durant son discours, ou celui du guerrier qui s'en parait pour aller au combat... Les maîtres de la pluie l'utilisaient aussi pour frapper rituellement le soleil.
La lame de la hache, ovale et aux bords très fins, est généralement faite de serpentine ou de néphrite. Elle est munie de deux trous à sa base, permettant de la relier au manche, par des tresses de poils de roussette et de fibres végétales. Le manche en bois est souvent enveloppé de tissu de coton européen, ou de tapa pour les haches les plus anciennes, par-dessus lequel figure un tressage complexe, en chevrons, de fibres de coco. La base du manche peut être sculptée ou se terminer par un socle fait d’une demi-noix de coco renfermant des éléments à fonction magique. Ce socle est généralement lui aussi enveloppé de tissu, puis d’un tressage en chevrons de poils de roussette, parfois orné de tresses arrondies garnies de coquillages, disposées autour du manche. 

Il est difficile de dire si les bambous gravés correspondent à une tradition reculée. Ils sont signalés dans les écrits dès la fin du 18ème siècle, et la plupart de ceux que nous connaissons aujourd'hui ont été collectés entre 1850 et 1920. Le bambou, qui entre dans la fabrication d'objets très variés, est ici un support de langage. Il peut être gravé de motifs variés, retraçant des scènes de la vie quotidienne (pêche, chasse et travaux des champs) ou des cérémonies coutumières et des événements marquants (marchés traditionnels, deuils, mariages ou guerres). On y trouve aussi des éléments évoquant les contacts avec les premiers Européens: chevaux, bateaux, fusils, maisons coloniales, soldats, hommes et femmes européens.

Les bracelets en cône servent de "bague de mariage" pour les femmes. Dans certaines régions du Nord Est de la grande terre, le bracelet est offert à une petite fille dès son jeune âge, afin de la promettre en mariage. Ils pouvaient être décorés d'une tresse en poils de roussette, terminée par des coquillages contenant des herbes magiques permettant la conquête amoureuse ou la protection contre les sorciers.

L'usage de massues pour la guerre et les danses est répandu dans toute la Nouvelle-Calédonie. La diversité de leurs formes correspond moins à des fonctions différentes qu'à l'affirmation de styles régionaux. Chaque groupe sociopolitique appose sa marque de fabrication sur les objets qu'il utilise.
La massue kanak à la forme du type "bec d’oiseau" est monoxyle: elle comprend un long manche et une tête triangulaire, pointue d’un côté et arrondie de l’autre, garnie en son milieu, de chaque côté, d’une boule en relief figurant l’œil. Le manche est parfois décoré d’une tresse de poils de roussette ou d'un
tressage en chevrons fait de fibres de coco.

la massue kanak à la forme de type "phallique" comprend une tête arrondie avec une collerette saillante, sur un long manche lisse avec à son extrémité un rebord en relief . Des gravures en chevrons sont généralement présentes sous la collerette et autour du manche, qui est parfois, comme pour les autres types de massues, parfois décorés de tressages.

Ces jupes de valeur sont en poils de roussette, ou en fibres végétales enroulées pour former des cônes. Leur fabrication demande de nombreux jours de travail et beaucoup de patience. Leur qualité esthétique dépend de la régularité et du parallélisme des franges. Elles sont échangées entre les femmes lors des cérémonies de naissance, mariage et deuil, et symbolisent la maison. Associées à une monnaie kanak, elles ont encore plus de valeur.

Le collier en perles de néphrite (abusivement appelé jade) caawe (langue Nemi), lié à un écheveau en poils de roussette, figurait parmi les richesses les plus prestigieuses, détenues par les épouses et les filles de chefs. L'écheveau en poils de roussette, hîjuk (langue Nemi), animal respecté par les Kanak, représentait aussi une importante monnaie d'échange : plus l'écheveau était long, plus grande était sa valeur.

Le masque, aussi appelé costume, de deuilleur kanak
Le masque est constitué de trois parties: la figure en bois sculpté, la coiffure, et le manteau de plumes.
La figure est sculptée dans un bois plus ou moins dur selon les régions. Elle est taillée d’une seule pièce dont l’intérieur est creusé afin de s’ajuster au visage du porteur. Des trous sont percés sur son pourtour afin de permettre l’accrochage de la coiffe au-dessus et du manteau en dessous. La partie représentant la bouche est la seule partie évidée de la figure, le porteur regardant par cette ouverture. Quand elle est munie de dents, celles-ci sont ajourées et peintes en blanc. Les lèvres, lorsqu’elles existent, sont généralement rouges. Pour les figures du sud, la bouche se borne à une simple ouverture de forme rectangulaire, parfois ornée de graines rouges (Arbrus precatorius) sur son pourtour.
La coiffure est constituée d’une armature de tiges végétales fixées sur le haut de la figure de bois, recouverte ensuite d’écorces battues (tapa) sur lesquelles sont cousus des cheveux humains ayant appartenu aux deuilleurs et, parfois, des tresses de poils de roussettes. Au sud, ce sont des racines de fougères qui font office de chevelure et de barbe. La coiffure est parfois ornée d’aigrettes de plumes ou d’une porcelaine blanche.
Le manteau est fait d’un filet de pêche entièrement recouvert de plumes de notou (Ducula goliath) dans lequel sont ménagées deux ouvertures pour les bras. Il couvre le porteur jusqu’aux genoux.

Au nord de la Grande Terre, le masque est étroitement lié à la chefferie qui s’en trouve dépositaire mais il est sous le contrôle d’une lignée déterminée à qui en est confiée la fabrication.. Chaque matériau qui le compose renvoie à des symboles marquant la position du chef dans la société. Le masque fait donc son apparition dans les grandes cérémonies d’échanges et dans les rituels de deuil du chef. Le jour de la levée de deuil du chef le masque surgit de la brousse porté par l’un des membres du groupe des deuilleurs apparaissant alors comme substitut du chef défunt. Ainsi le masque constitue le lien symbolique entre le monde des vivants représenté par le chef et celui des morts : le monde sous-marin évoqué notamment par le filet de pêche.
Au sud de la Grande Terre, où le masque semble être l’objet d’une introduction récente, il était totalement absent des rituels de deuil. Il était plutôt utilisé comme instrument de jeux et dans les pratiques magiques liées à la guerre

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